dimanche 14 mars 2010

Cortège

175 x 200 cm huile sur toile
Passez devant ces gens, vidés de toutes consistances, velléitaires
et ennuyeux. Ils restent sur place, pris dans une torpeur continue et quotidienne.
Ils attendent, tranquillement enlisés dans ce cortège sans sens.

Figurés en simples motifs plats, ordonnés, ce ne sont que des enveloppes, des marionnettes.
Dans cette mascarade, ayant perdu toute passion, ils sont
charpis, rongés par la déréliction.
Ils se laissent vivre, portés par la masse
comme par un courant.
Les corps, ces morceaux de chair inerte mais présents, se ramollissent. Et ça continue...







Ma réponse pour l'exposition MONSTER MUNCH venue à la suite de l’exposition BEAUTÉS MONSTRES qui s’est déroulée l’automne et l’hiver 2009-2010 au musée des Beaux arts de Nancy.

Travaux des étudiants de l’atelier peinture,
3ème et 4ème année option art,
présentés du jeudi 4 mars 2010 au mercredi 17 mars 2010,
au musée des Beaux-Arts-3, Place Stanislas 54000 Nancy
Ouvert de 10h à 18h, tous les jours sauf le mardi.






Il semblerait pourtant qu’on prenne plaisir à se laisser aller. On se complait aussi dans l’apparence, l’enveloppe des choses (comme Andy Wahrol qui disait que tout n’était qu’enveloppe). La vie quotidienne nous porte par ses habitudes, ses rituels. La passivité semble confortable. Les modèles affichés de comportements, l’éducation des médias semblent attendre le mimétisme. De la même façon que la surface du miroir, on reflète la chose. On avale les images qu’on nous sert.

C’est en travaillant sur la notion du monstrueux que j’en suis venue là. En m’appropriant ce thème j’ai peint ma vision des ruines humaines.
Et j’ai voulu transmettre ma vision à travers une peinture pour expérimenter l’huile à ma façon et avoir la liberté de construire mon image dans le temps. Le forma fut choisi qu’il soit en accord avec notre échelle, et le lieu d’exposition (qui s’avéra être une erreur…). Sans accrocher ni surélever la toile, ils sont plus proches de nous. Ils sont à notre niveau, avachis et dans le sens de la marche.
Leurs ombres ou leur souvenir ont été peint plus loin, parallèlement. Il s’agissait de prolonger leur cortège, de l’étendre.

La toile a pour titre « cortège », une façon de nous mettre à l’esprit « funèbre » ..



Elle représente une file d’attente sans sens, d’individus de chaire, d’enveloppe mais démunis d’intériorité. Des être humains alignés, rangés les uns derrière les autres qui tournent en rond.
On atteint seulement leurs surfaces, et on y reste enfermés, comme eux. On peut scruter leurs apparences mais pas plus.

J’étais partie de l’idée de cannibalisme, pour parler du rapport pernicieux des individus. A travers cette image il y a de simples rapports humains. Nous sommes tous anthropophages dans le sens où nous prenons de l’autre, où nous cédons à l’autre. Nous sommes tous monstrueux sous une normalité prétendue. Je voulais mettre en scène des personnages semblables. Ils se recopient, n’ont plus de cerveau et en on besoin d’un autre, celui de devant.

Ils sont du coloriage. Ils sont du remplissage. Contre le murs, ils forment une frise, un bas relief en miroir. Les figures sont découpées, elles s’imbriquent de façon artificielle.
Leurs jambes sont suggérées et s’arrangent assez strictement, leurs habits sont traités en aplat, puis les bras mous, traités de façon « réalistes » affichent le poids de leur corps, l’importance de leur chaire, de leur animalité, plus haut, les visages se tendent.
Cependant, j’ai trouvé que le cercle qu’ils forment n’était pas assez sournois. C’est pourquoi, il n’y a eu aucune marque de barbarie, et qu’ensuite j’ai voulu personnaliser leurs émotions (même celles improbables, agonie, souffrance, dévoration, rêvant, impassible, en les gardant vides). Finalement, c’est pour les rendre plus réalistes que je me suis tournée vers la passivité. Ils s’ennuient d’être là, simplement. Ils sont lassés de tout, et ça, pour moi c’est une peur. L’angoisse d’avoir autour de moi aucune passion et la frustration de constater que certains se laissent vivre.

J’attendais de ma peinture quelque chose de communs et que tout le monde pratique avec virtuosité et impuissance à la fois.
Qu’elle illustre une absurdité jolie et naze, idiote. Que rien ne se passe, que ce soit d’un ennui mortel. Qu’il ne se passe rien plutôt. Que ce soit inutile presque. Une image devant laquelle on se comporte de la même manière que ce qu’elle représente ! (blasé, vidé)

Seulement, j’aime pourtant leur platitude sans savoir pourquoi. Peut être parce qu’on peut plus facilement comprendre les chose quand elles deviennent planes. On est tous un peu dans leur situation.

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